L’exil et la plénitude

Je me suis tourné les doigts et la tête quelques heures avant de trouver un sujet aujourd’hui. Et puis je me suis dis que je n’avais pas à vous casser les oreilles avec ma fille ou bien mon rôle de père à tous les billets que j’écrivais. Je suis un père c’est vrai, mais je suis aussi un individu qui est autre chose qu’un père. Un ami, un étudiant, un travailleur, un amoureux (au sens très large) de la vie et des êtres que je rencontre. C’est d’ailleurs un équilibre que je tente d’avoir le plus possible dans ma vie. Ne pas être que ça, un père. C’est fondamental pour moi et je crois profondément que c’est également très sain pour ma fille. L’autre m’a déjà dit que j’étais « dépendant » de ma fille. Encore aujourd’hui cette phrase résonne en moi avec une certaine stupeur (et pas parce que je crois que c’est vrai!). On y reviendra dans un autre billet. 

Je suis père donc. Je suis également étudiant. Dernièrement, j’ai assisté à une très belle conférence (poétique même je dirais) sur Charles Taylor. Vous vous souvenez de la comission Bouchard-Taylor? Bon, c’est ce Taylor là. Pour résumé grossièrement, Taylor fait une distinction entre trois « états » spirituels de l’existence: l’exil, la plénitude et l’intermédiaire. 

L’intermédiaire, c’est la vie de tous les jours. On se lève, on va bosser, on arrive le soir, on prépare le souper en vitesse, on se claque un ou deux épisodes d’une série et pouf, de retour dans le lit. Pas vraiment de moment pour la réflexion spirituelle dans tout ça. On est pas mal, on est pas en extase, on fait juste être. 

L’exil et la plénitude sont les deux faces d’une même médaille. Dans les derniers mois, j’ai été en exil de moi-même. Ce moment où le sens semble s’évanouir devant nos yeux, où tout n’est qu’incompréhension et brouillard. On veut comprendre. On cherche la lumière, quelques percées de soleil qui illumineraient l’opacité de la situation qui est devant nous. Mais rien, niet. Peut-être parce qu’il n’y a rien à comprendre. Peut-être que malgré toute la compassion du monde dont on peut faire preuve, on y arrivera pas. Ou peut-être bien aussi parce que ce qu’il y a à comprendre est intolérable, inacceptable pour nous. Pour moi. 

Avez-vous parfois cette impression de vous retrouvez exactement au même endroit, mais quelques années plus tard? C’est un sentiment qui m’habitait dernièrement. 32 ans, retour aux études, retour au célibat, retour aux petits boulots pour survivre à la fin du mois. Mais ce sentiment est faux. Il est aussi profondément malhonnête et ingrat pour les gens qui m’entourent. Desjardins chantait: « Revenir d’exil comporte des risques/Comme rentré une aiguille dans un vieux disque ». C’est juste. Mais quand on s’exile de soi-même, cela veut également dire qu’on revient, un jour, à soi-même. 

C’est peut-être là que la plénitude commence…

  1. #1 par najet le novembre 22, 2013 - 1:21

    Ce qui me rassure c’ est que je ne suis pas la seule ‘a passer par ces même étapes.J’aime ce post il me ressemble, je le vis, y a deux jours je me disais que j’avais rate ma vie de couple, ma vie professionnelle, je suis une mère et non plus une femme mais j’ aime mon rôle. mais pas sure que je suis une bonne mère, je passe mon temps à courir, je prends 2 secondes pour m’habiller et une pour tomber comme une souche d’arbre le soir. Je me suis exilée de tout et surtout de moi même, ce qui me fait peur c’ est est ce que je vais revenir à moi même !!! merci pour la réflexion.

    • #2 par papaneprechepas le novembre 22, 2013 - 10:25

      Merci à vous! J’écris ce blog en partie pour sortir de ma solitude également, car je sais que je ne le suis pas et que nous sommes plusieurs à vivre ce que je vis. Si cela peut toucher d’autres personnes, alors je peux dire mission accomplie!

      • #3 par najet le novembre 23, 2013 - 1:33

        oui mission accomplie 🙂 d’autres part cela me permet de voir de l’autre coté,du coté des hommes et peut être me faire une idée de ce que vous vivez aussi, on vous crois pas mal insensibles, ou je suis tomber sur les pires hihi…. c’est ce qui me laisse dans ces différents états » spirituels de l’existence et ne pas encore en sortir….reste que j’ai confiance et le sourire.

  2. #4 par J le novembre 22, 2013 - 4:01

    Un texte comme ça me donne envie de prendre la 417 et de profiter de la route pour discuter avec toi.

  3. #5 par J le novembre 22, 2013 - 4:01

    Ça doit vouloir dire que tu me manque aussi

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